Plan
- Introduction
- Hygiène irréprochable
- La posologie (fréquence et durée d’utilisation)
- Accoutumance
- Crème, pommade ou lotion
- Massage et quantité
- Appliquer la cortisone au bon endroit
- Hydratation et dilution de la pommade
- Les « bobos » et la cicatrisation
- Enfants
- Ne restez pas seul(e) avec votre traitement inefficace ou vos questions
- En bref
- Cartes-résumés
Texte relu par un dermatologue en juin 2020.
Introduction
Un peu d’éducation thérapeutique…
L’Éducation Thérapeutique du Patient (ETP) vise à améliorer la prise en charge du patient en lui permettant de s’autonomiser, d’acquérir et de conserver des compétences afin de mieux vivre sa pathologie.
Fondation Eczéma, Définitions et objectifs de l’Éducation thérapeutique
Cet article Comment bien appliquer les dermocorticoïdes est incontournable pour plusieurs raisons :
- Il va vous informer et l’information permet l’appropriation qui permet de mieux vivre la maladie.
- Faire ces recherches m’a rassurée et m’a appris beaucoup de choses alors que je suis sous traitement depuis plusieurs années. Il va donc sûrement vous rassurer à propos de la cortisone et de ses effets indésirables.
- Il va aussi vous expliquer la bonne marche à suivre pour appliquer les dermocorticoïdes, le principal traitement proposé pour le lichen scléreux.
- En tant que parent d’enfant atteint, il va vous permettre de discuter plus sereinement avec votre enfant et de mettre en place une autonomie de l’enfant.
Pourquoi la cortisone pour le lichen scléreux ?
Le traitement le plus reconnu scientifiquement pour enrayer l’inflammation induite par le lichen scléreux c’est la cortisone en pommade ou en crème (appelée « dermocorticoïde »). La molécule active la plus recommandée est le propionate de clobetasol. C’est celle qu’on retrouve dans dermovate, dermoval, clarilux… Certains dermatologues vont prescrire des crèmes moins puissantes. Cela peut dépendre de leurs connaissances sur le sujet mais aussi de leur envie de ne pas vous prescrire le traitement le plus puissant dès le début ou encore de faire selon la gravité de votre cas. Si vous avez le moindre doute, un deuxième avis médical ne fait jamais de mal.
Diminution du risque de cancer et de récidive de cancer
Le LS est une des rares pathologies dermatologiques a pouvoir évoluer en cancer si elle n’est pas prise en charge (bien que cela reste peu fréquent). Selon les médecins, ce risque est bien maîtrisé avec un bon suivi du traitement à base de dermocorticoïdes et des examens médicaux réguliers (et donc des auto-vérifications régulières à l’aide d’un miroir aussi).
En savoir plus avec l’article Auto-examen et journal de symptômes ou les fiches d’auto-examen de l’association Verein Lichen Sclerosus.
Traiter même sans symptômes ?
Il me semble important de rappeler que le LS peut être actif sans symptômes. Ainsi, le LS peut provoquer des modifications de l’apparence de la vulve (signes cliniques) sans démangeaisons/sensations de brûlure (symptômes). Il est donc important de bien consulter un médecin au moindre changement clinique même si vous n’avez aucun symptôme. De plus, cela signifie également qu’il faut prendre garde à l’idée qu’on ne traite qu’en cas de symptômes. Le LS est une maladie qui se traite même sans symptômes sauf avis contraire de votre médecin.
En savoir plus avec l’article C’est quoi le lichen scléreux ?
Utiliser un miroir
Il est donc d’autant plus conseillé de s’aider d’un miroir pour appliquer la cortisone pour les femmes tandis que les hommes pourront voir directement où ils appliquent le traitement.
Les effets indésirables maîtrisés par la bonne application du traitement
Cet article va vous donner les conseils des médecins pour bien appliquer la cortisone. Car bien appliquer le traitement est la base numéro 1 pour bien gérer le lichen scléreux mais aussi pour éviter des effets secondaires dus à une mauvaise application.
La peur des dermocorticoïdes est assez connue et c’est un sujet traité notamment par l’association suisse Verein Lichen Sclerosus. Voici quelques points pour vous rassurer.
Les dermocorticoïdes contiennent de la cortisone à faible dose et ce traitement, même tenu sur long terme, est différent des corticoïdes par voie orale. Ne confondez pas les deux : les effets secondaires sont différents. Malgré tout, certaines molécules des dermocorticoïdes sont plus puissantes que d’autres, notamment celles les plus recommandées pour le LS, et l’apparition d’effets secondaires est justement corrélée à la puissance et à la durée du traitement.
Pour en savoir plus vous pouvez lire Dermocorticoïdes : incontournables et redoutés de la Revue Médicale Suisse.
La corticophobie a suivi le développement de [dermocorticoïdes] toujours plus puissants, accompagnés d’effets indésirables plus visibles. Les médias, la vaste gamme de [dermocorticoïdes] et les conseils contradictoires des différents professionnels de la santé sont responsables de cette peur et d’une incompréhension des patients. […] Ainsi, la corticophobie naîtrait du manque de connaissances et engendrerait une mauvaise adhérence au traitement. L’éducation thérapeutique est donc primordiale pour un traitement plus sûr et pour l’adhérence thérapeutique.
Céline Zenklusen, Laurence Feldmeyer (Revue Médicale Suisse)
Les effets secondaires de la cortisone sont assez bien maîtrisés en cas d’application localisée (parties génitales) sur moyen/long terme si le traitement est bien suivi :
- Ne pas dépasser le nombre d’applications.
- Bien appliquer en massant légèrement et aux bons endroits.
- Être régulier.
- Être rigoureux.
- Protéger et hydrater par ailleurs la zone.
Je reviens en détails sur ces recommandations plus bas.
Surveiller la santé vulvaire (risque de mycoses/infections)
L’association suisse Verein Lichen Sclerosus rappelle néanmoins que cette application sur long terme peut favoriser des mycoses car la cortisone affaiblirait le système immunitaire local.
En savoir plus avec l’article Lichen scléreux, mycoses et infections (pertes vaginales).
Maîtriser la maladie est plus important
Enfin, l’association suisse explique qu’un LS non traité serait plus dommageable (risque peu fréquent mais existant de cancer de la vulve) que des effets secondaires généralement réversibles de la cortisone.
En savoir plus avec la fiche A propos de la cortisone : Utilisation de la cortisone chez les patients atteints du LS de l’association Verein Lichen Sclerosus [en français]
Si vous souhaitez discuter d’un autre traitement avec votre spécialiste que ce soit à cause d’une intolérance cutanée ou non : voyez avec lui pour diminuer progressivement et évoquez avec lui d’autres possibilités. Il existe en effet d’autres traitements moins privilégiés car moins efficaces.
Comme alternative à la cortisone, des antagonistes de la calcineurine (Pimecrolimus ou Tacrolimus) peuvent également être utilisés.
Verein Lichen Sclerosus – Diagnostic et traitement
Cas particuliers
- Si vous êtes enceinte, les risques de l’application localisée de la cortisone en pommade sont documentés. Discutez-en avec votre médecin et il adaptera le traitement. Certaines femmes ont connu une phase calme de la maladie durant leur grossesse (selon les retours d’expérience des femmes du groupe de soutien).
- Pour les enfants comme pour les personnes âgées, la finesse de la peau induit une absorption supérieure. Pour autant, les effets indésirables des dermocorticoïdes semblent être les mêmes que sur les adultes à l’exception des bébés prématurés. Il n’y aurait donc pas plus de risques pour un enfant que pour un adulte.
Hygiène irréprochable
Lavez-vous bien les mains avant et après ! Le lavage de main optimal se trouve facilement sur Internet. Dans la pratique, on va souvent plus vite que ça mais ce petit tutoriel permet de se rendre compte qu’on est parfois négligent sur certaines zones des mains (notamment les ongles et le bout des doigts).
Je vous recommande de laver vos ongles avec une brosse ou de couper les ongles (ce qui peut être pratique pour moins se blesser en cas de démangeaisons). Certaines femmes utilisent un gant jetable ou un « gant de doigt » pour appliquer sur la zone (en coupant les doigts d’un gant).
Ayez les mains propres et bien sèches pour prélever la crème depuis le tube ou le pot ou utilisez une spatule propre. Ce conseil est valable pour tous les produits dermocosmétiques.
Évidemment, quand vous allez aux WC ce sont les mêmes précautions : se laver les mains avant !
En savoir plus avec l’article Conseils généraux.
La posologie (fréquence et durée d’utilisation)
Il existe de nombreux protocoles qui diffèrent selon votre cas (vos signes cliniques) et la gravité de la maladie mais il y a une base commune :
- une phase « d’attaque » 1x par jour pendant plusieurs semaines/mois ;
- diminution progressive sur plusieurs semaines/mois (1 jour sur 2 puis 3 fois par semaine) ;
- jusqu’à 1 fois par semaine en entretien.
L’arrêt du traitement est à voir alors en fonction de vos signes cliniques, de vos symptômes et donc de la maladie et du fait qu’elle soit en phase active ou non.
Il faut retenir que la « phase d’attaque » du traitement permet d’enrayer l’inflammation tandis que les applications espacées (1 à 2 fois par semaine) correspondent à une phase d’entretien nécessaire pour éviter les effets secondaires mais aussi pour maintenir le LS. D’après l’association suisse Verein Lichen Sclerosus, cet espacement des applications, cette pause nécessaire pour la peau, ne peut avoir lieu qu’après la phase d’attaque (de plusieurs semaines à plusieurs mois). Lors d’une « crise » ou « poussée » ainsi que lors d’une « rechute », ce conseil n’est donc pas applicable.
Certains médecins préconisent un traitement d’entretien à vie comme c’est le cas du Dr Goldstein. C’est en tout cas très discuté au sein même de la communauté scientifique (les médecins européens auraient d’ailleurs plus tendance à ne pas maintenir le traitement contrairement aux médecins américains). Le traitement d’entretien à vie par dermocorticoïdes est d’ailleurs préconisé pour d’autres pathologies chroniques que le LS.
L’arrêt d’un dermocorticoïde doit toujours se faire avec l’avis d’un médecin qui connaît la maladie. L’arrêt est généralement progressif. Il faut retenir que la maladie peut être active même si vous n’avez pas de symptômes et qu’il est déconseillé par le milieu médical de stopper le traitement sans un avis médical préalable.
Les dermocorticoïdes sont généralement appliqués le soir mais l’association suisse du lichen scléreux spécifie que si la personne a du mal à dormir à cause du traitement, elle peut la mettre le matin.
Certains médecins recommandent d’appliquer le produit après avoir « trempé » la vulve dans de l’eau un peu chaude comme c’est le cas du Dr Goldstein (bain de siège d’eau chaude mais pas trop chaude). Cela permettrait à la molécule active de bien pénétrer la peau. De manière générale sans forcément parler du LS, l’application des dermocorticoïdes après la douche est recommandée car la pénétration est alors plus efficace sur une peau tout juste hydratée. Ce n’est pas prouvé scientifiquement. J’ai consulté un dermatologue français à ce sujet : selon lui il ne faudrait pas trop s’en préoccuper.
Accoutumance
La cortisone crée une accoutumance (moins importante avec les dermocorticoïdes mais bien présente surtout sur un traitement mis en place depuis plusieurs semaines) ainsi si vous choisissez d’arrêter votre traitement prenez toujours l’avis de votre médecin pour le faire progressivement. Vous remarquerez que le protocole le plus commun correspond d’ailleurs à une diminution progressive dès que l’inflammation est stabilisée pour maintenir une application par semaine. Par ailleurs, cela éviterait un effet rebond.
C’est aussi à cause de cela qu’il ne faut pas abuser de la cortisone. Ce n’est pas un médicament anodin. Pour autant, les effets secondaires sont encore une fois maîtrisables.
Si vous avez une posologie d’une fois par jour c’est une fois par jour pas deux ! Il faut d’ailleurs être régulier avec la cortisone et suivre la posologie donnée par le médecin (en revenant vers lui selon l’évolution de la maladie). C’est un traitement qui demande de la constance comme pour l’hydratation. Les médecins n’ont d’ailleurs pas montré l’intérêt de deux applications quotidiennes et au contraire cela augmenterait le risque d’effets indésirables.
Enfin, la cortisone ne s’utilise normalement pas de façon ponctuelle pour le lichen scléreux. Sauf avis contraire de votre médecin – notamment en cas de LS bien maîtrisé – les dermocorticoïdes sont à utiliser sur moyen/long terme.
Crème, pommade ou lotion
Il existe différentes formes galéniques.
- La pommade minimiserait les risques d’allergies et de réactions cutanées selon certains médecins et serait plus efficace pour pénétrer la peau (elle est plus occlusive).
- La crème est la forme la plus simple d’application mais plus de risques d’irritation.
- La lotion et le gel sont souvent recommandés pour les zones pileuses.
Discutez-en avec votre médecin afin que vous choisissiez la texture qui vous convient le mieux en termes de facilité d’application et de réduction des risques de réaction. Personnellement, je préfère le baume et la crème.
Massage et quantité
Les patients ne savent pas toujours quelle quantité utiliser et il semble compliqué de peser la dose. En outre, on croit bien faire en en mettant beaucoup ou en mettant la pommade en couche.
Or non seulement la pommade doit être bien massée pour pénétrer la peau mais en plus la quantité doit être minime : une noisette ou un petit pois ! Avec la cortisone, trop en mettre = faire pire que mieux.
Pour l’étaler correctement : prélevez la quantité du « petit pois » et répartissez-la par petites touches sur les zones concernées et enfin massez légèrement.
Beaucoup d’entre nous ont constaté un engrenage infernal quand on en met trop. Inversement une utilisation sporadique n’aura pas l’effet escompté sur l’état inflammatoire sous-jacent.
Le massage léger est clairement préconisé. On est nombreuses à mettre la pommade et basta mais il faut bien faire pénétrer la pommade ! Pour cela, il faut masser. Doucement. Mais masser. Pour indication, certains médecins donnent une estimation de 1 minute 30 secondes de massage. En vérité, faites au mieux tant que vous massez pour bien faire pénétrer la crème. Selon un dermatologue consulté à ce sujet, 30 secondes suffisent amplement.
Voici un extrait trouvé sur un site de médecine français.
« Le traitement d’attaque de référence consiste dermocorticoïdes: 1 application/ jour pendant environ 3 mois : jusqu’à rémission complète, de dermocorticoides de classe forte (Diprosone)(Betneval) à très forte (Dermoval) de la taille d’un petit pois ou une demi-unité phalangette au maximum à chaque application en faisant bien pénétrer la crème »
Lee Andre, Bradford Jenni and Fischer Gayle
L’unité « phalangette » est très bien décrite dans cet article de la Fondation Eczéma. Retenez que pour la zone concernée vulve et/ou zone anale, il ne faut pas dépasser la demi-phalangette. Si vous avez du mal à étaler, discutez-en avec votre médecin afin de choisir une texture adaptée et vérifiez que vous n’en mettez pas sur des zones qui n’en ont pas besoin.
Appliquer la cortisone au bon endroit
Je ne vous fais pas une blague. Je ne suis pas en train de dire que vous ne savez pas où est votre vulve 😉 Néanmoins, n’hésitez pas à étudier votre anatomie et à connaître le nom des constituants des parties génitales.
Les dermocorticoïdes sont très puissants et ne doivent être appliqués que sur les zones atteintes par le LS en accord avec votre médecin spécialiste. Par exemple, pour mon cas bien précis, mon dermatologue insistait pour que j’applique la cortisone en priorité sur la zone interlabiale et les lèvres extérieures et que j’évite le plus possible les lèvres intérieures (ce qui est compliqué je l’avoue quand il y a atrophie). Pour les patients atteint jusque l’anus, il faut prendre en compte cette zone.
Dans tous les cas, pour un lichen scléreux vulvaire, il ne doit jamais y avoir d’application dans le vagin ou dans la zone entre les lèvres intérieures.
En savoir plus avec le schéma donné sur la dernière page du document Utilisation de la cortisone chez les patients atteints du LS par l’association Verein Lichen Sclerosus.
Donc le petit pâté de cortisone étalé à la main « comme ça sans y toucher sans y jeter un œil » ce n’est pas forcément la bonne technique. N’hésitez pas à vous aider d’un miroir dans un premier temps pour bien repérer les lésions. Accroupie au-dessus du miroir par exemple.
Normalement, votre ordonnance doit bien spécifier les zones à traiter et le cas échéant les zones qu’il ne faut pas traiter. N’hésitez pas lors de la consultation à le demander clairement au médecin.
Dans tous les cas, vues les zones concernées (les parties génitales), ne vous inquiétez pas de déborder des lésions car c’est compliqué de faire autrement. Selon un dermatologue consulté à ce sujet ce n’est pas grave de déborder tant qu’on applique bien le traitement sur les zones atteintes. Il est donc important de comprendre où les lésions sont situées en regardant avec un miroir (qui peut devenir inutile par la suite pour l’application des soins).
Hydratation et dilution de la pommade
En savoir plus avec l’article Avec quoi hydrater ?
Certaines patientes et certains médecins conseillent de diluer le dermocorticoïde dans un peu de crème hydratante. Et ce pour trois raisons :
- Le lichen scléreux est souvent traité par la cortisone mais les médecins omettent de conseiller d’hydrater. Hydrater c’est d’ailleurs complexe comme processus : En diluant la cortisone dans une crème, on se dit qu’on fait d’une pierre deux coups.
- Diluer la cortisone peut aider à l’étaler correctement.
- On a ensuite peur des effets secondaires de la cortisone et on cherche à les amoindrir (par méconnaissance essentiellement mais aussi à cause de la réputation de la cortisone par voie orale et des effets secondaires d’un traitement sur long terme).
En tant que site d’informations tout public je suis obligée de spécifier que ce conseil est controversé et même déconseillé par des médecins.
L’association anglaise de dermatologie conseille au contraire d’hydrater avec un émollient APRÈS avoir mis la pommade à base de cortisone.
Ils recommandent d’attendre 20 minutes après avoir mis la cortisone pour hydrater. En effet, diluer la crème va amoindrir son efficacité. Selon le Dr Goldstein, la peau atteinte par le LS n’est pas fine comme on le pense et au contraire elle possède une architecture très spécifique et très éloignée d’une peau saine. Elle a comme une couche impénétrable qui rend difficile l’accès à la vraie zone d’inflammation (bien en dessous).
Par ailleurs, diluer pour amoindrir les effets secondaires c’est amoindrir aussi l’efficacité du traitement. Dans le cas d’une forme sévère de LS, cela me paraît être un peu risqué.
À retenir : mettre la cortisone et hydrater sont deux actions différentes. Libre à vous de prendre conseil auprès de votre médecin ou de suivre votre propre avis si cela vous réussit. Disons que dans le cas de lichen scléreux très grave il vaudrait mieux ne pas diluer la cortisone. Pour un traitement de fond avec un lichen « endormi », vous seriez libre de faire comme vous voulez. Mais gardez à l’esprit que cela amoindrit les effets de la cortisone (sinon comment cela amoindrirait les effets secondaires). Un dermatologue consulté à ce sujet précise que l’hydratation peut tout simplement se faire en alternance : le soir la cortisone et hydrater le matin et/ou les soirs intermédiaires de la cortisone.
Les « bobos » et la cicatrisation
Bobo, fissure, coupure, plaie, érosion, lésion, ulcération nous avons beaucoup de mots qui reflètent des réalités différentes. Que ce soit à cause d’une plaie spontanée car la muqueuse est fragilisée ou une plaie due à des démangeaisons (ou autre), en cas de peau/muqueuse abîmée vous pouvez ressentir une brûlure temporaire à l’application consécutive de la cortisone.
C’est de notre expérience de patientes que je tire cette observation. Je n’ai pas de retour médical sur ce sujet mais bien des témoignages. La cortisone nous brûle parfois quand on est à vif. Ainsi, si vous avez la possibilité de faire cicatriser un petit peu avant de mettre la cortisone ce n’est pas plus mal. Après un rapport ou une auscultation qui aurait créé une blessure à la fourchette postérieure, vous pourriez mettre une crème cicatrisante (cicalfate, crème à base d’oxyde de zinc, etc.).
Si vous êtes à vif, attendez un petit peu car la cortisone est aussi un traitement de fond et n’a pas tout le temps un effet de soulagement immédiat et sur des plaies c’est parfois le contraire. À savoir que cet effet de brûlure n’est pas systématique et va dépendre de la personne et du dermocorticoïde.
Si vous avez une plaie qui ne part pas même avec le traitement, veillez à en parler à votre médecin, ce n’est pas normal. Bien que des bobos spontanés ou provoqués (après des grattages intempestifs, après des rapports sexuels, après auscultation, après un prélèvement pas fait en douceur, après l’insertion d’un traitement par voie vaginale, après un coup en vélo, bref, vous avez compris) puissent durer dans le temps, il vaut mieux prendre garde et faire examiner les plaies qui durent.
Enfants
Cette petite vidéo faite pour les enfants par la Fondation Eczéma peut être une base de discussion avec eux. L’association italienne Lisclea a par ailleurs mis à disposition des parents/enfants un album bilingue Le domande di Emma ou Emma’s questions de Daria Tinagli et illustré par Sarah Khoury depuis mars 2020. En français, il existe aussi Julie et les coquillages du Dr. Irène Dingeldein de l’association suisse Verein Lichen Sclerosus.
Un article est disponible pour Album illustré pour enfants : Le domande di Emma ou Emma’s questions de Daria Tinagli.
Âge d’autonomie ?
En tant que parents, appliquer les soins à un enfant de 3 ou 4 ans nous semble plutôt raisonnable. Inversement, l’adolescence va être une période durant laquelle l’enfant cherche à faire par lui-même. Entre les deux existe une période flottante durant laquelle on ne sait pas trop si c’est encore à nous, parents, d’intervenir, ou si c’est à l’enfant de prendre la main. Cela va dépendre de beaucoup de facteurs dont le caractère plus ou moins indépendant de l’enfant (bien que celui-ci soit très imbriqué avec la façon dont les parents se comportent avec l’enfant), la maturité, l’âge de la puberté (disons la période à laquelle l’enfant devient pubère), le côté maternant des parents (il est compréhensible qu’un parent ait du mal à lâcher son enfant dans le monde réel).
Contactée à ce sujet, la Fondation Eczéma donne comme référence l’âge de 6 ou 7 ans pour l’autonomie dans l’application des émollients et l’âge de 10 ans (soit l’entrée au collège) comme âge d’autonomie pour l’application des dermocorticoïdes.
Il peut être intéressant de prendre en compte le développement de l’enfant et notamment l’âge de pudeur. Selon le site Naître et Grandir, dont le texte a été supervisé par une psychologue, le sentiment de pudeur apparaît dès 4 ou 5 ans. L’enfant est de plus en plus pudique dès 7 ans.
En savoir plus avec cet article sur l’âge de pudeur du site naitreetgrandir.com
C’est à nous adultes et parents de comprendre quand lâcher prise – que l’enfant soit en demande ou non. Il n’existe pas de mode d’emploi de l’enfant (et heureusement !).
Il n’y a donc pas d’âge recommandé pour le lichen scléreux mais certains conseils donnés ci-dessous guideront les parents.
Laisser l’enfant être actif
Aussi, [l’éducation thérapeutique] ambitionne de positionner l’enfant comme un acteur de la prise en charge de sa maladie, afin de développer son autonomie. […] Elle vise en effet à limiter les échecs thérapeutiques, ces derniers étant typiquement observés dans les pathologies dermatologiques chroniques. Enfin, elle cherche à favoriser l’adhésion aux traitements topiques, à lutter contre la corticophobie et à améliorer l’alliance thérapeutique entre le soignant, l’enfant et son entourage.
Diane BAYLÉ, L’ATOPIE DU JEUNE ENFANT ET SA PRISE EN CHARGE EN DERMATOLOGIE, thèse de Pharmacie soutenue en 2016.
Pour les enfants, les laisser faire en autonomie leurs propres soins va permettre qu’ils s’approprient ce protocole et leur intimité dès que possible (qu’ils comprennent bien que leur sexe est intime). Afin de bien vivre leur maladie et l’observance du traitement, le mieux est de les rendre actif rapidement. C’est le même principe que pour un adulte : être actif dans son traitement permet de mieux vivre la maladie et de ne pas avoir la sensation de subir et d’être passif.
Donc dès qu’ils sont en âge, laissez-les faire. On est surpris, ils peuvent être encadrés mais ils savent faire plein de choses très tôt tout seuls. Vous pouvez chaperonner votre enfant durant quelques semaines/mois/années pour vous assurer qu’il l’applique en bonne quantité, au bon endroit et en massant doucement (et non pas en déposant une couche de crème). Une bonne façon de procéder est d’intégrer l’enfant progressivement aux soins en le laissant faire lui-même petit à petit.
Les aspects ludiques fonctionnent assez bien : une comptine, une routine en chanson, un rituel bien particulier, histoire de donner à la fois le rythme (respecter la posologie) et la manière d’appliquer (dosage, massage).
La Fondation Eczéma recommande le jeu de la coccinelle : c’est le nom donné à la technique (valable pour les adultes) pour étaler correctement un soin en appliquant des petites touches espacées sur les zones cutanées concernées. La fondation a d’ailleurs mis à disposition des patients des petites étiquettes à coller sur les tubes de crème émolliente et de la cortisone pour guider l’enfant.
Dans le livre bilingue Le domande di Emma ou Emma’s questions de Daria Tinagli, la psychologue et responsable du domaine pédiatrique de l’association italienne Lisclea(sorti en mars 2020 et illustré par Sarah Khoury), le personnage Emma, la petite fille atteinte de lichen scléreux, a ses rituels et des mots qui donnent un sens à ce qu’elle fait : le jour « magique » est le jour de visite chez le pédiatre et la crème hydratante est sa crème « préférée » par exemple. Tout est sous forme de jeu adapté à son âge.
Que ce soit pour éviter d’être intrusif juste avant ou durant l’adolescence ou pour permettre à l’enfant de s’en sortir tout seul quand il dort en dehors de la maison familiale, c’est très utile de tout faire avec lui et de le rendre actif de manière progressive.
Conseils pratiques
Il n’y a pas d’âge recommandé mais on peut voir les enfants se prendre en main après avoir suivi le bon protocole avec un des parents dès 8 ou 9 ans. L’important est d’insister sur le lavage des mains avant et après. Il ne faut pas s’inquiéter que l’enfant mette mal sa crème une ou deux fois : cela n’aura pas d’impact. Selon un dermatologue consulté à ce sujet, comme chez l’adulte, ça déborde toujours un peu des zones atteintes compte tenu de l’anatomie.
Comme pour les adultes, vous pouvez couper les ongles courts ou leur proposer une brosse à ongle (le dessous des ongles est souvent négligé durant le lavage des mains). Qu’ils cèdent à la démangeaison ou qu’ils appliquent leurs soins, avoir les ongles courts est un conseil assez facile à mettre en œuvre. Si l’enfant a d’ailleurs tendance à se gratter dans son sommeil, vous pourriez lui acheter en pharmacie des gants lavables en coton blanc. C’est une technique qui peut permettre de passer des périodes difficiles et temporaires. Dormir sans sous-vêtements est souvent conseillé mais je pense que comme avec les adultes s’il y a grattages nocturnes inconscients, il vaut mieux garder les sous-vêtements et aviser ensuite quand les démangeaisons sont calmées. Dans le livre Le domande di Emma ou Emma’s questions de Daria Tinagli, le personnage d’Emma a une jolie petite trousse qu’elle emporte avec elle quand elle est en dehors de la maison. Cette trousse contient tout ce qu’il faut : sous-vêtements doux, pantalons confortables, ses produits de soins.
Sauf indications contraires la plupart des conseils donnés sur ce site est valable pour les enfants. Vous pouvez en retrouver notamment dans l’article Conseils généraux.
En ce qui concerne la communication avec les enfants, vous pouvez leur expliquer les choses régulièrement car ils grandissent et ont besoin de plus d’informations et de reformulations adaptées. Selon leur âge vous pouvez être plus ou moins précis. Le personnage Emma du livre de Daria Tinagli sait qu’elle doit prendre soin de sa peau car elle est « fragile » même sans parler de « maladie ». Il est important de rappeler aux enfants qu’ils ne sont pas les seuls à avoir cette maladie et à avoir des soins à faire.
Tout le monde a quelque chose de spécial dont il doit prendre soin.
Le domande di Emma ou Emma’s questions de Daria Tinagli, traduction en français
En savoir plus avec l’article Album illustré pour enfants : Le domande di Emma ou Emma’s questions de Daria Tinagli.
Ne restez pas seul(e) avec votre traitement inefficace ou vos questions
Souvent quand nous allons mal nous cherchons des solutions seules alors que le médecin est là pour ça : gynécologue, sage-femme ou dermatologue. Même si ce n’est pas un spécialiste du lichen scléreux entourez-vous d’un médecin disponible (mail, téléphone, rendez-vous). Ce dernier peut se mettre en relation avec le spécialiste pour assurer également le suivi. N’hésitez jamais à le contacter en cas de « poussée » mais aussi si vous remarquez un changement anatomique suite à votre auto-vérification.
Un suivi chaque mois peut être envisagé en période de reprise quotidienne du traitement ou en cas de « crise ». Ensuite, un rendez-vous tous les 6 mois est une recommandation fréquente.
Vous pouvez bien entendu développer un sens de l’autonomie et réagir rapidement quand une crise de démangeaisons survient en reprenant le traitement un peu plus fréquemment. Vous pouvez discuter de cela avec le médecin en anticipant. Certains médecins sont en effet partisans d’une reprise de la cortisone selon les symptômes. C’est très discuté. Les communautés de patientes sont là pour vous entourer et vous remonter le moral mais le premier conseil à appliquer c’est bien de contacter le médecin qui vous suit (ou un nouveau si vous n’avez personne).
Les médecins sont là pour vous expliquer la maladie, le traitement. Ce site existe car nous constatons trop souvent hélas qu’il y a un manque, des informations qui ont la vie dure (comme le fait que ce soit une maladie pour les femmes âgées) ou que durant le premier rendez-vous où vous avez eu le diagnostic vous avez été si assommé(e) que vous ne vous souvenez pas de tout ce qui a été dit. Encore une fois : rappelez le médecin et redemandez-lui des infos ! Si vous avez la moindre question et que ce n’est pas traité sur ce site, venez en parler avec le groupe de soutien ou parlez-en en commentaires 🙂
Ne restez pas seul(e). Vous n’êtes pas seul(e).
[Pour réduire le risque d’effets indésirables], il s’agit de sélectionner la forme galénique, la puissance, la dose et la durée selon le diagnostic, la localisation, l’étendue des lésions et l’âge, et de prescrire la dose minimale efficace. La fréquence d’application est importante : une application par jour suffit généralement car les [dermocorticoïdes] s’accumulent dans la couche cornée (effet réservoir) avant d’être absorbés progressivement vers les couches plus profondes. Ainsi, plus d’une application quotidienne n’améliore pas l’efficacité du traitement, mais augmente le risque d’effets non souhaités […]. Enfin, il est nécessaire de constamment réévaluer le traitement, particulièrement dans le cas d’atteinte cutanée chronique.
Céline Zenklusen, Laurence Feldmeyer (Revue Médicale Suisse)
En bref
- L’usage de dermocorticoïdes est le principal traitement proposé pour enrayer/ralentir le lichen scléreux. Ils permettent de réduire l’inflammation localisée mais ne guériraient pas le LS (la maladie serait chronique).
- Le LS peut être asymptomatique. Le traitement peut donc être mis en place par votre médecin si vous avez des changements cliniques sans symptômes.
- Il ne faut pas s’inquiéter outre mesure des effets secondaires tant que le protocole d’application est bien suivi, que vous hydratez bien en parallèle et que la posologie est bien respectée (des applications quotidiennes puis espacées dans le temps).
- Les dermocorticoïdes peuvent chez certaines femmes provoquer des infections/mycoses à cause de l’affaiblissement local du système immunitaire.
- Si vous avez le moindre doute, parlez-en avec votre médecin et posez-lui vos questions ou prenez une deuxième opinion médicale.
- N’arrêtez jamais la cortisone brutalement et sans avis médical à cause de l’accoutumance de ce médicament mais aussi d’un possible effet rebond de la maladie.
- Aidez-vous d’un miroir si vous êtes une femme : il est votre meilleur ami pour vous auto-examiner et appliquer vos soins.
- Lavez-vous les mains avant et après.
- La posologie et la durée du traitement par cortisone doivent bien être respectées : en général une phase « d’attaque » pour réduire l’inflammation puis une diminution progressive pour maintenir une application ponctuelle et régulière afin de maintenir la situation.
- Il existe différentes textures : des crèmes, des lotions et des pommades. La pommade est la plus recommandée (minimise les risques de réactions et bonne pénétration de la cortisone) mais la crème peut être étalée plus facilement.
- La quantité à appliquer est très petite : un petit pois ou une demi-phalangette. Il faut appliquer le produit aux endroits atteints et ne pas trop dépasser de ces zones désignées par votre médecin.
- Prélevez la quantité du « petit pois » et répartissez-la par petites touches espacées sur les zones atteintes et enfin massez légèrement pour faire pénétrer le traitement.
- L’hydratation est indispensable car elle n’est pas apportée par le traitement et elle permettrait d’amoindrir les effets de la maladie et les effets secondaires du traitement. Il est recommandé d’hydrater ou de mettre des crèmes cicatrisantes en alternance de la cortisone et non pas en même temps. Vous êtes libre de faire autrement en discutant au préalable avec votre médecin.
- Les enfants peuvent être encadrés puis laissés en autonomie dès que c’est possible pour respecter leur intimité et les préparer à des situations où vous ne seriez pas présent. Cela se fait de manière progressive en rendant l’enfant actif durant son traitement.
Cartes-résumés
Icons made by Darius Dan from www.flaticon.com
Icons made by Good Ware from www.flaticon.com
Icons made by Pixel perfect from www.flaticon.com
Icons made by Freepik from www.flaticon.com
Icons made by DinosoftLabs from www.flaticon.com
Portez-vous bien 🙂