L’article Lichen scléreux et autres pathologies/troubles a introduit l’idée qu’il existe des maladies similaires qui peuvent être confondues et qu’on peut avoir plusieurs pathologies. Les plus communes sont l’infection et la mycose.
L’article Hygiène intime et lichen scléreux aborde le sujet du microbiote vaginal et du pH de la vulve en rapport avec les mycoses et vaginoses.
Automédication
Les pathologies vulvaires ont des symptômes en commun et il est possible de les confondre. Le médecin qui vous suit doit connaître les pathologies de la vulve afin de vous orienter vers le bon diagnostic et donc la bonne prise en charge.
Il vaut mieux éviter d’entamer un traitement en automédication sur un diagnostic que vous auriez vous-même posé.
Certains traitements en libre-service pour des infections ou des mycoses peuvent irriter la zone quand ils sont utilisés trop fréquemment (car non appropriés).
Les pertes vaginales et le lichen scléreux
Que faire en cas de pertes vaginales anormales (couleur/odeur) ? Le lichen scléreux ne touche que la muqueuse de la vulve normalement et pas le vagin. Si vous avez des pertes il est plus probable qu’il s’agit d’une autre pathologie que le LS. La plus grande probabilité est que vous ayez une vaginose (infection) ou une mycose (candidose).
Facteurs favorisant les infections et les mycoses
Le LS n’est pas une pathologie anodine. Les traitements peuvent impliquer des changements du pH de notre zone intime. Parfois certaines personnes se grattent avec des doigts « sales » – ce qui contamine la zone.
Le candida albicans, le champignon fréquemment coupable de créer des mycoses, est un petit habitant « normal » de notre flore vaginale. Et quand celle-ci est déséquilibrée, le candida s’installe et prend ses aises. Il s’installe encore plus facilement chez des femmes qui font régulièrement des mycoses.
Les traitements antibiotiques déséquilibrent la flore parfois jusqu’à plusieurs semaines après la fin de la prise du médicament (les antibiotiques ça fait le ménage des mauvaises mais aussi des bonnes bactéries).
Le traitement du lichen scléreux vulvaire à base de dermocorticoïdes (cortisone) peut perturber le système immunitaire local. Par découlement, les dermocorticoïdes topiques ont tendance à enflammer les mycoses.
Un autre facteur favorisant les vaginoses et les mycoses c’est l’hygiène intime excessive (proscrire le lavage plusieurs fois par jour ou la douche vaginale).
Enfin, les pics hormonaux peuvent influencer également l’équilibre de la flore et le système immunitaire (d’où les mycoses juste avant les règles).
Par ailleurs, nous utilisons des soins hydratants. Ces derniers ne sont pas des perturbateurs de la flore mais ils n’aident pas pour autant. Ne pensez pas que votre crème hydratante aide à rétablir votre flore. La flore se rétablit d’elle-même avec le temps si on sort d’un traitement antibiotique ou avec l’utilisation de probiotiques (bien que ce soit discuté).
Leucorrhées, pertes, glaire cervicale, sécrétions…
Voici donc un petit topo très rapide et simpliste pour comprendre les pertes vaginales ou « leucorrhées« . Vous pouvez aussi lire le très joli livre de Raissa Blankoff, paru en 2017 aux éditions Amyris : Le livre du cycle féminin à mettre entre toutes les mains.
Il y a la glaire cervicale typique de l’ovulation chez la femme non ménopausée (ces pertes sont parfois absentes quand il y a contraception). Ces sécrétions bien que désagréables ou gênantes par leur abondance chez certaines femmes (c’est discutable après !) sont NORMALES. Elles interviennent surtout autour du 14ème jour du cycle et durent quelques jours. C’est très approximatif car ça va dépendre des femmes. Ces pertes sont très élastiques vers la fin, comme du blanc d’œuf, sans odeur, à la limite un petit peu blanc ou jaunâtre voire transparent.
Il y a aussi les sécrétions liées à l’excitation sexuelle : elles proviennent notamment des glandes de Bartholin (à l’entrée du vagin).
Les pertes pathologiques
Les pertes peuvent être pathologiques si elles ne s’apparentent pas à ça. Mais ce qui va surtout déterminer la présence ou non d’une pathologie c’est la couleur et l’odeur. Retenez bien que le LS n’est pas vaginal et ne va donc pas créer de pertes.
On va parler de vaginose s’il y a un déséquilibre dans la flore vaginale dû à un agent pathogène (bactérie par exemple) et de candidose ou de mycose si c’est un champignon qui prend le dessus (comme candida albicans). Voici un petit schéma simpliste pour les différencier :
- Pertes comme du lait caillé et/ou démangeaisons (vaginales et/ou vulvaires) et/ou pic de crise avant les règles = mycose
- Pertes grises ou une autre couleur et/ou odorantes = infection.
Ça existe : Il est possible aussi d’avoir une infection ET une mycose. Il est possible de ne pas avoir de symptômes. Et toutes les infections ne provoquent pas des pertes malodorantes. Une infection ne sera pas systématiquement traitée si elle est essentiellement vulvaire car elle peut être due à un traitement inapproprié du LS.
C’est un schéma qui peut vous aider à y voir plus clair et surtout à prendre rendez-vous chez votre gynécologue ou sage-femme pour faire un prélèvement. Le prélèvement peut être vulvaire et/ou vaginal.
En savoir plus avec l’article Mycoses et vaginoses de Périnée Bien Aimé, l’association de sages-femmes.
Nota bene pour les mamans d’enfants atteintes : coupez-leur les ongles courts et/ou encouragez-les à se laver les mains fréquemment. Les petites filles et les jeunes filles peuvent aussi avoir des infections et des mycoses. Chez les petites, pensez à leur apprendre à s’essuyer après les selles d’avant en arrière pour éviter de « ramener » les bactéries des selles vers la vulve.
En savoir plus sur les conseils spécifiques aux enfants dans l’article Comment bien appliquer les dermocorticoïdes ?, l’article Conseils généraux et l’article Hygiène intime et lichen scléreux.
Conseils pour soulager en attendant de voir un médecin
Ces conseils ne se substituent pas à une consultation. Il est important de prendre en charge de façon appropriée les pathologies et déséquilibres qui sont à côté du lichen scléreux. La zone cutanée atteinte est fragile et nécessite des soins doux. L’application répétée de traitements inefficaces peut contribuer à de la récidive et à de l’adaptation des agents pathogènes (résistance aux traitements).
Pour vous soulager rapidement d’une mycose en attendant de voir la sage-femme ou le gynécologue et/ou ensuite :
- Si les démangeaisons sont insupportables vous pouvez tenter la poche de gel dans un linge propre durant une vingtaine de minutes. Le froid apaise parfois le côté « chaud ».
- Ne vous fiez pas totalement au test de pH fourni en pharmacie par des marques gynécologiques (ils ne sont pas suffisamment fiables) ;
- N’abusez pas du sucre pendant les jours où vous avez une mycose/une infection. Le sucre c’est la nourriture de la plupart des cellules dont les bactéries.
- Des probiotiques vaginaux achetables en pharmacie (peuvent soulager mais c’est du long terme et ne guérit pas non plus et à savoir que les probiotiques sont controversés en cas d’antibiothérapie et qu’il vaut mieux varier les souches) ;
- Ne pas trop laver pour ne pas décaper toujours plus (la douche vaginale ce n’est pas du tout une bonne idée et utiliser des savons agressifs ou des lingettes parfumées non plus) ;
- Si vous n’avez pas rendez-vous rapidement et que vous êtes sûre à 100% de votre diagnostic, il y a certains traitements qui sont accessibles en pharmacie sans ordonnance (certaines molécules fonctionnent mieux que d’autres notamment Sertaconazole et Econazole pour les mycoses et il y a des produits pour les vaginoses en libre-service). Mais très honnêtement, c’est parfois le début d’un cercle vicieux car ces traitements sont moins dosés et parfois pas assez efficaces ;
- Exigez le prélèvement de la part de votre médecin. C’est indolore et ça permet de vérifier si c’est rouge et que ça gratte à cause du LS, d’une mycose ou d’une infection ou d’une irritation passagère. Un médecin peut vous faire éventuellement une ordonnance d’avance pour un prélèvement en laboratoire ou un auto-prélèvement ou une ordonnance en attendant de pouvoir prendre rendez-vous.
- Discutez avec votre médecin pour un traitement antimycosique (voire un traitement de fond en cas de récidives) par voie orale afin d’éviter les ovules antimycosiques parfois très agressifs pour votre muqueuse déjà sensible.
Le coup d’oeil expert « ha ! mais c’est bien rouge oui c’est sûrement une mycose » : pas de ça avec nous. Nous sommes bien trop fragiles pour tolérer l’à-peu-près.
Que faire si vous avez un traitement par crème en plus du traitement à la cortisone ? Vous pouvez éventuellement mélanger les deux lors de l’application de la cortisone, alterner les deux dans la journée ou suspendre le temps du traitement celui à base de cortisone. Demandez toujours à votre médecin pour connaître la meilleure façon de procéder. Cela dépendra de la puissance de la maladie, de votre état au moment du traitement par exemple.
En bref
- Le LS est une pathologie vulvaire qui peut être confondue avec une autre pathologie. Le prélèvement, non douloureux, reste primordial pour diagnostiquer et traiter de façon appropriée.
- En cas de doute, discutez avec un médecin.
- La mycose et l’infection sont notamment des pathologies fréquentes qu’on peut avoir à côté d’un lichen.
- Le LS induit une prise en charge appropriée et précautionneuse des autres pathologies pour éviter d’irriter inutilement la zone cutanée atteinte.
Portez-vous bien !